La doctrine qui sévit aujourd'hui en matière de spiritualité c'est celle de "Lucifer" le "porteur de lumière" s'il fallait la nommer. Non pas en tant qu'un vilain diable avec des cornes qui veut que tout le monde finisse dans des marmites bouillantes et de vilains chaudrons en terre cuite, mais en un être très beau et très subtil plein de promesses.
Il ne voue un culte qu'aux anges et esprits de lumière et veut que nous fassions notre demeure au milieu de belles lumières à l'exclusion du reste, refusant de fait le principe de l'incarnation qui conduit à une obscurité fondamentale, une misère essentielle et une pauvreté caractéristique.
Et bien c'est exactement le motif de "Lucifer" selon certaines exégèses, à savoir que c'était un être sublime qui a été "théophanisé" et a tellement "saisi" (comme diraient les bouddhistes) la lumière émanant spontanément de l'Etre des êtres qu'il en a oublié la racine et a été au propre et au figuré aveuglé.
Il a voué un culte au phénomène apparent en oubliant la source. Du coup, au moment de l'union de l'esprit et de la matière (une sorte de "pré-incarnation " en fait, de répétition générale métaphysique), il s'est offusqué en voyant une "erreur" dans le "plan" divin qu'il allait lui-même réparer en établissant un "royaume dans le royaume" qui aie sa propre souveraineté.
Pourquoi faire apparaître de l'altérité (une substance autre, qu'on l'imagine pré-éternelle ou créée à partir de rien) là où il y a une telle perfection lumineuse ? (qui va automatiquement déchoir : Lucifer n'était pas stupide il avait bien senti les choses et la catastrophe à venir puisque l'être partiellement obscurci conjoint à la matière à toute les chances de quitter l'harmonie première du royaume angélique et semer la zizanie). A partir de là le doute s'instille, le vent de la révolte commence à gronder et certaines cohortes angéliques frémissent.
Zinzendorf (un Protestant) fait même de Lucifer le "frère jumeau de Jésus" dans la mesure où il est son reflet parfait qui devait coopérer mais s'est révolté, refusant l'incarnation qui va devenir l'oeuvre du Christ. Ils ont donc une grande connaissance et intimité l'un de l'autre car ils proviennent tous deux du monde angélique initial.
Aujourd'hui l'expérience la plus partagée c'est une sorte de paix immense, d'équanimité lumineuse où tout semble s'apaiser et devenir radiant, tranquille, posé, silencieux... Comment ne pas la confondre avec les prémisses du bonheur et de la sérénité absolue qui nous attend ?
En s'interrogeant sur notre situation réelle, notre environnement, soit l’écologie au sens noble. D'où apparaît cette "paix" subite et si fantastique, cet oasis de clarté soudaine et revigorante ? De la partie de notre âme non incarnée qui a son origine et sa racine dans le royaume angélique qui est celui de Lucifer dès l'origine.
A partir de là, fascinés par ce phénomène émergeant de paix et de lumière équanime, nous oublions de nous questionner sur son origine et d'examiner en quoi il impacte quoi que ce soit et produit une transformation. Sinon nous verrions qu'il ne nous appartient pas vraiment mais est l'oeuvre du "premier principe", du rayonnement angélique, de l'émanation première de qualités mais coupée de la matière soit de la création.
La matière a pour origine un "feu" qui consume et embrase. Il se “compactifie” dans un premier temps avant sa libération de la gangue et la cuirasse où il est mis en camisole de force. Il produit le mal-être ordinaire qu'on constate et qu'on ressent quand on ne (se) le cache pas.
Cette expérience de paix représente une "mise entre parenthèse" du monde, une sorte de repos et de parenthèse entre deux enfers qui joue un rôle de soporifique et de narcotique, un peu comme une oasis dans un désert aride, une fontaine désaltérante au milieu d'une mer de flammes dévorantes. Elle peut aussi s’accompagner d’une clarté surnaturelle et dans les cas extrêmes d’une quasi omniscience (subjective).
Lucifer n'a jamais admis l'idée de l'incarnation donc il aime produire et infuser cet état pour répandre son influence. Cet état a une propriété commune avec la grâce (sa partie lumineuse) mais n'étant pas relié à la partie matérielle (le feu), il aboutit à une forme de dé-corporisation subtile donnant sens à l'adage familier : "qui fait l'ange fait la bête".
En effet, après la drogue vient la rechute dans la matière et le retour en force de "l'animal" vital qui estime cependant ne plus exister du fait qu'il s'est faussement identifié à sa partie angélique. Le résultat est une doctrine confondant tout en tout et affirmant l'"unité" absolue de tout en tous avec pour seul auteur un Dieu omniprésent qui ne laisse aucune place à sa créature dans une sorte de jeu vidéo géant et fantomatique singeant certaines propriétés du monde angélique (le pendant étant le déchaînement des forces vitales et mentales souvent refoulé et “mis sous le boisseau”) avec un panneau publicitaire clignotant : “nous avons été compagnons depuis l’éternité”.
Son frère nous dit : “nous serons amis pour l’éternité”.